Corps de ciel, corps en apesanteur, corps-univers. Jeune artiste venue du Japon, Rina Maruyana, parisienne d’adoption, propose une très riche vision renouvelée de l’humain.
Spiritualisée, densifiée et comme en apesanteur, la chair sacralisée se détache pudiquement, et fièrement, de l’étendue. Elle règne en plénitude. En infinitude.
La sagesse d’Asie étreint du dedans ses somptueuses nudités. Empreintes d’une autre pensée, quand c’est le corps qui déclenche des pensées, et oxygène au profond le mental. Les corps peints de Rina Maruyana, sur fond d’insondable espace, sont autant de repères d’âme, aux confins de tous les attendus charnels. Ses corps, toujours en position statuaire, sont en situation dominante. Ils règnent en majesté charnelle. Ils portent la contemplation jusqu’au bord aigu de l’infini.
Le corps d’apparat est un corps factice, fabriqué de toutes pièces culturelles, imposé et dogmatique. Le corps maruyanesque est vécu, vital et habité. Il est demeure d’universelle humanité. Corporéité marquée d’abstraction sensuelle, et riche de chaude épaisseur vitale.
Le corps d’apparence est fantôme d’éternité. Le corps peint des peintres est corps d’ultime résistance, corps d’indispensable vérité. Le corps des profondeurs n’a pas voix au chapitre léger des apparences.
Le corps, distingué du paysage, incarne une sorte de rupture symbolique du cordon ombilical, la possibilité de vivre sans attache, dans l’autonomie d’une relation de maîtrise existentielle.
Cette séparation première suppose la capacité d’accueil de l’altérité intracorporelle.
L’artiste, comme le pharaon défunt s’auto-engendrait pour l’éternité de sa renaissance, recrée son corps par le processus de création, comme il recrée le paysage charnel de sa vie rêvée.
L’oeuvre de Rina Maruyana démontre l’impérieuse nécessité du dépouillement pictural. Et le regard enfin s’abandonne à l’essentiel. < Christian Noorbergen